Dossier

Hors série |KINK: Au-delà du BDSM

La relation intrinsèque qui unie le BDSM (bondage, domination, sadisme, masochisme) au théâtre fut la porte d’entrée afin d’exploiter l’un par l’intermédiaire de l’autre. En effet, Pascale St-Onge et Frédéric Sasseville-Painchaud, eux-mêmes adeptes de ces pratiques sexuelles, ont vu en la notion de spectateur une niche vers laquelle se tourner afin de démystifier et détabouiser le BDSM. En effet, le BDSM n’existe pas sans consentement. À leurs yeux, le consentement au théâtre existe dès l’achat du billet. Grâce à leur création, KINK, présentée à l’Espace libre du 18 au 27 octobre, Pascale et Frédéric tentent de créer une ambiance en vase clos qui permet d’établir un lien entre ce que leur proposition scénique suggère et chacun des spectateurs dans la salle. Je vous invite à découvrir le compte-rendu de mon entretient avec Pascale et Frédéric sur leur approche unique pour parler du BDSM.

Il y a maintenant un peu plus de 3 ans, j’ai mis sur pied ce blogue afin de décortiquer l’art du drag. Cette tribune devint ma manière de mettre en lumière un univers connu, mais à la fois méconnu. Il s’agissait d’une manière de présenter une réalité pourtant bien établie, mais dont la représentation grand public repose essentiellement sur des idées préconçues et dépassées. Pascale et Frédéric ont trouvé grâce au théâtre une manière similaire de procéder afin de déconstruire les mentalités stéréotypées du BDSM à travers leur propre expérience. Le spectacle KINK se divise en trois temps. La première repose sur des épisodes vécues par nos deux protagonistes alors qu’ils s’initiaient aux plaisirs du BDSM. La seconde partie abonde en ce sens, mais est présenté davantage comme une suggestion afin de permettre aux spectateurs de se mettre en scène et de créer leur propre scénario. Le spectacle se conclut sur une version réinventée du classique Le petit chaperon rouge dans laquelle les rôles de pouvoir s’échangent entre le loup et le petit chaperon rouge.

Une telle initiative théâtrale ne peut exister sans de solides bases. L’essentiel de leur proposition artistique repose sur le lien de confiance qui doit s’installer entre eux et chacun des spectateurs. Cette connexion intime assure un climat de sécurité et de bienveillance de part et d’autre du quatrième mur.  Dans ce projet, le spectateur assure un rôle, sans doute le plus important : celui de voyeur. Le spectateur demeure donc actif. Non seulement l’objectif est de lui faire porter une réflexion sur sa propre vie sexuelle, mais également, de fil en aiguille, de le mettre suffisamment à l’aise pour le rendre participatif à l’action. En effet, tout au long du spectacle, le leitmotiv « veux-tu jouer avec moi ? » raisonnera. Les spectateurs auront lors de la représentation deux occasions pour se joindre à l’action. Leur implication s’axera surtout comme celle d’un dominant. L’optique n’est pas de mettre qui que ce soit mal à l’aise. Le spectateur demeure libre de ses choix. Ultimement, le but est d’en arriver à nommer son désir et non pas d’en avoir peur.

 

Et qu’en est-il du drag ?

Comme mon blogue porte sur les drag-queens, je ne pouvais pas passer à côté d’une petite comparaison entre l’art du drag et l’approche envers le spectateur de la pièce KINK puisque ceux-ci abordent d’étroits liens. Le drag est un art de l’émerveillement à travers lequel le spectateur joue un rôle crucial. Il est très important que ce dernier manifeste sa présence et sa satisfaction. De plus, il doit être ouvert à ce que l’action sur scène se transpose dans la salle puisqu’au final, il s’agit d’un immense terrain de jeu. Jusqu’où un spectateur a-t-il accordé son consentement en prenant place dans le public ? Il va de soit que la réalité des bars ne permet pas réellement d’établir un lien de confiance comme c’est le cas dans KINK.

Toutefois, le drag étant maintenant plus mainstream, les drag-queens sont appelées à sortir des bars pour faire des événements corporatifs, des mariages ou mêmes, des lectures de contes aux enfants. Dans ce contexte où l’on sort le personnage de son « milieu », ce n’est plus le spectateur qui doit apprivoiser la drag-queen, mais celle-ci qui doit apprivoiser le public. Cette inversion des rôles apporte une nuance dans la notion de consentement chez les drags. Barbada, par exemple, qui fait la lecture de contes à des enfants dans des bibliothèques municipales doit non seulement mettre en confiance les enfants, mais également les parents qui viennent assister, afin de déconstruire le mythe entourant son travail.

 

Dans un cas comme dans l’autre, il faut déboulonner les mythes. Chaque occasion est pertinente et s’inscrit dans un processus de conscientisation collective. La pièce KINK est une opportunité de découvrir le BDSM sous un autre jour, au-delà de l’iconographie véhiculée, à travers l’expérience personnelle des créateurs. Le spectacle est construit de manière à ce que le spectateur prenne conscience que, comme toute chose, il y a un éveil et que celui-ci n’arrive pas du jour au lendemain. Il y a un processus qui s’installe, puis petit à petit, on découvre. Ce processus se développe avec ses hauts et ses bas afin de connaître nos limites. Finalement, rappelons-le, il faut arriver à nommer son désir… mais surtout, de se respecter.

 

KINK – Présentée du 18 au 27 octobre à l’Espace libre

Visitez la page web de la pièce pour en connaître davantage sur le spectacle et la terminologie liée au BDSM.

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